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Photo du rédacteurLudovic Herman

Totems et tabous en entreprises... ou quelles statues chuteront à la rentrée ?


J’ai toujours eu un faible pour les statues, alors toute statue jetée à terre ne me laisse pas de pierre. Depuis que j’ai découvert Camille Claudel, j’ai aussi une affection irrationnelle pour les sculptrices sentimentales qui transforment la terre ou la pierre en créations porteuses de plus de 3 dimensions. Depuis Giacometti et son homme qui marche, je rêve aussi de statues en mouvement qui feraient tomber leur masque et leur armure pour se mettre à transformer notre monde parfois figé dans son passé. 


Quand Louis Gallois me dit "le statut n’est pas une statue"


Alors, quand Louis Gallois, président de la SNCF à l’époque, me dit un jour en me regardant dans les yeux "vous savez, le statut n’est pas une statue …", je ressentis une sacrée émotion. C’est quand nous lui proposions des changements concrets pour donner ‘de l’oxygène’ à la cathédrale du ferroviaire sans y mettre le feu qu’il prononça cette expression. Il nous avait missionné pour mener une lutte sans pitié contre une plaie endémique : la bureaucratie (sujet toujours d’actualité cf la une Mammouth du Point en juillet) qui ralentit, alourdit, décourage les agents et les clients des entreprises.


Il ne fit pas que dire ces mots, il me regarda et en management, comme en amour, les regards échangés parlent parfois mieux que les mots prononcés. En cette période où des statues sont déboulonnées, son regard qui semblait soupeser l’épaisseur de mon âme m’ébranla tant que je m’en souviens encore.


Je pris conscience à ce moment-là que, pour un patron authentique (sentimental ?), aucun sujet, même un totem comme le statut, n’est tabou, aucun sujet n’est statufié, figé à jamais ou impossible à faire évoluer.


Son regard porteur de bienveillance et d’exigence me poussait à dépasser mes préjugés et à faire tomber de leur hauteur mes croyances, sortes de statues intérieures héritées de mon passé. Il me disait en silence et en conscience " Ludovic osez me surprendre et ne doutez que des dubitatifs qui vous diront ou penseront "c’est impossible, irréaliste, utopiste". Peut-être que, comme France Gall, il aurait ajouté : "Résiste ! Prouve que tu existes, cherche, bats-toi, et refuse ce monde égoïste". Son regard semblait conclure par un "Dites OUI, si on vous demande si vous croyez vraiment au changement" 


Encouragé par ce soutien aujourd’hui lointain, je me demande quels totems statufiés en entreprise pourraient être chahutés, voire chuter à la rentrée. J’en vois deux le présentéisme et le pesage des postes mais n’hésitez pas à partagez votre point de vue sur les pages des réseaux sociaux de l’entreprise sentimentale.


Peut-être que les statues du présentéisme et du pesage de poste seront déboulonnées à la rentrée ?


Peut-être que la statue du présentéisme en entreprise sera déboulonnée ? La statue du présentéisme fixe son regard sur l’horaire de votre arrivée et de votre départ. Elle confond présence et performance et aime les sacrifices de vie privée.  Elle répète "arrivez tôt, partez tard, n’atteigniez aucun objectif, mais ayez toujours l’air …débordé et je vous promouvrais". Le présentéisme pourrait bien tomber, car la COVID a prouvé que l’efficacité et les circuits courts valaient mieux que le temps passé.


Peut-être que la statue du pesage des postes sera dépoussiérée ? Cette statue discrète, mais influente, jauge les justes écarts de rémunération entre tous les postes des grandes entreprises. C’est elle qui détient les clés de la ‘justice salariale’. Elle justifie secrètement qu’un poste soit payé 2, 3, 10, 20 … fois plus qu’un autre sans qu’on s’en étonne. Oui mais… (car en sentiment, comme en affaire, il y a toujours des mais), qui connait les critères clés de pesée, qui détermine combien chacun doit être payé ?


Ce secret pourrait tomber : une re-discussion des critères de pesée augmenterait le sentiment de justice salariale au sein de l’entreprise.


Pour alimenter le débat, je suivrais ce à quoi m’encourageait le regard de Louis Gallois : oser des critères peu usités par le pape du sujet, le cabinet Hay. Les poids du critère "risque" : un poste précaire et fortement exposé à la conjoncture,  du critère "défi" : un poste contributif à un défi difficile avec tout le stress associé, du critère "contact client" : un poste en prise direct avec le public avec la charge mentale associée, du critère "frugal" : un poste consommant peu de ressources externes, gérant peu d’ETP, pourraient voir leurs poids augmentés à la rentrée.


Ainsi la balance serait rééquilibrée quand la pesée accorde souvent beaucoup d’importance aux postes protégés de la conjoncture par des rentes de situation, très gourmandes en ressources et peu exposées aux contacts stressants.


Pour conclure, je vous recommande en cet été "œil du cyclone sanitaire (i.e entre 2 confinements)" de faire… le maximum de rencontres. Rencontrez des points de vue iconoclastes pour faire descendre de leur piédestal certaines de nos statues intérieures, reflets d’un monde dépassé. Comme Louis Gallois, encouragez, même simplement du regard, tous les audacieux.es que vous croisez sur votre chemin, baisser votre le masque le temps d’un sourire, cela sèmera en eux et en elles des graines qui germeront le jour venu.


Sentimentalement vôtre.


(1) J’étais à l’époque chef de projet au BCG en charge du projet De l’Oxygène pour la SNCF  J’étais à l’époque chef de projet au BCG en charge du projet De l’Oxygène pour la SNCF



Crédit photo : Louis Gallois, patron de la SNCF, en 2009

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