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Guerre des talents ou l’offensive de l’armée de Terre sur le front du recrutement


En cette rentrée d’automne morose où le chômage explose je pensais honnêtement qu’on parlerait peu de la guerre des talents. Je me disais qu’elle appartenait au passé, cette guerre de tranchée ou l’on s’arrache les plus doués. Je me trompais, cette guerre n’est pas terminée, elle est même relancée par l’armée de Terre française. En effet, si nombre d’entreprises ont hésité à sortir la grosse Bertha, voire toute l’armada, pour séduire les plus talentueux en cette rentrée, l’armée de Terre n’a pas cillé ni hésité et a lancé une offensive décomplexée de captation sur tous les fronts.


Emmenée par le général d’armée Thierry Burkhard qui veut une force …endurcie (facile pour lui qui a déjà "hard" dans son nom), l’armée de terre a lancé une campagne qui n’y va pas par quatre chemins.


Elle combine la raison (des priorités, des leviers, de l’AI,…) et l’émotion d’une musique palpitante qui rappelle celle des 120 battements de cœur des soldats en Opex et/ou sentimentaux. Elle semble bien décidée à couvrir 16 000 postes dont certains ne reviendront pas entiers ou pas vivants, s’inquiètent certains parents qui voient dans ces jeunes gens dans la fleur de l’âge encore des enfants. Mais sans crier gare, l’armée de Terre avec "sengager.fr" a envahi de ses vidéos les métros et les réseaux sociaux. Si je la trouve décapante et intrigante cette dixième édition de leur campagne de recrutement c’est qu’elle résonne avec l’évolution en cours dans le monde sans pitié de la "talent acquisition".


L’armée cible les talents engagés différents des talents travailleurs d’antan


Oui, si elle m’intéresse au premier chef cette offensive, c’est que l’armée, comme les entreprises à mission ou sentimentales, cible les talents engagés i.e passionnés par l’humain et prêts à tout donner pour des valeurs, des causes et des missions comme la fédération des "ingenieurs-engages.org". Or les talents engagés sont différents des talents travailleurs (TT) d’antan surtout motivés pour monter le plus vite possible tout en haut de la hiérarchie.

Rappelons qu’un talent travailleur, espèce majoritaire hier mais en voie de disparition, était prêt à tout pour son employeur. Prêt à sacrifier ses jours, ses nuits, sa vie sociale, amoureuse, parentale pour in fine "réussir dans la vie" ! Oui un TT, comme le coupé Audi du même nom, se donnait sans compter pour grimper les pentes escarpées d’une vie professionnelle ascensionnelle faites de gros jobs, grosses équipes, gros budgets, …. L’employeur, reconnaissant pour ses Top 1 000, 100, 10, 1…, en contrepartie de leurs dévouements, leur offrait des revenus croissants, du statut ronflant et des attributs resplendissants. La promesse implicite était qu’un jour, tout en haut de l’échelle professionnelle qu’il gravit toute sa vie, le TT se retrouverait au sommet, peut-être dans un bureau en haut d’une tour d’où il pourrait voir le monde à l’envers comme dans Starmania mais se dirait "Dieu que c’est beau la vie, vue d’en haut, on y rencontre même des alter ego qui, comme moi, ont réussi à monter toujours plus haut".


Nombre d’entreprises se décident en 2020 à avoir une conscience et pas seulement à se donner bonne conscience


Oui mais tout cela c’était avant 2020 ... Avant qu’en janvier Philip Morris ne s’engage, par passion (?) à arrêter d’enfumer la planète. Avant qu’en mai, Netflix, par générosité (?), ne fasse plus payer ses abonnés (absents), ou qu’en juin Danone ne devienne, par conviction (?), la première entreprise à mission du CAC (1) ! Avant aussi que des dizaines entreprises ne fassent leur "coming out" en révélant au grand jour leur raison d’être et leur fierté de faire du bien à la société. En bref, avant qu’un nombre croissant d’entreprises ne se décident à avoir une conscience et pas seulement à se donner bonne conscience et qu’elles souhaitent ÊTRE utiles au monde en plus d’augmenter leurs AVOIRS (qui finit souvent plein nos armoires, dixit Alain Souchon).


Pour capter les talents, on doit proposer un ascenseur existentiel … en sus de l’ascenseur professionnel


Ma conviction c’est que désormais pour capter les talents engagés, prêts à se donner corps et âmes pour une raison d’être ou une mission, les entreprises, comme l’armée, doivent proposer un ascenseur existentiel en sus de l’ascenseur professionnel.

"Mais Kesako Papa que l’ascenseur existentiel ?" Me questionne mon cadet Clovis de 12 ans intéressé par les vidéos de 6 à 10 secondes de l’armée de Terre qui ont un air de tiktok "oui c’est quoi ce concept que Google ne connaît pas (encore ?) me demandent ses sœurs ainées Tiffany et Saskia marquées par leur JDC ?"

Je réponds de but en blanc "tu sais que tu prends un ascenseur existentiel quand ta vie professionnelle t’aide à réussir ta vie personnelle, quand elle te fait grandir sans te faire vieillir, quand elle te permet d’acquérir de la maturité sans attendre le nombre des années ou quand elle te fait vivre des émotions plus que de raison. Grace à cet ascenseur, tu savoures le présent et tu te dis vivement lundi ! Un ascenseur existentiel, c’est aussi appartenir à un projet collectif plus grand que soi mais où tu es quand même toi. Il te révèle qu’avec le temps tes impossibles deviennent possibles et non l’inverse et que les portes s’ouvrent à toi plutôt qu’elles ne se ferment sur toi. Voilà, c’est cette promesse de t’aider à réussir à vraiment "vivre ta vie", plus que réussir "dans la vie" qu’offre l’ascenseur existentiel et c’est cette promesse que l’armée de terre à ciblée avec toute son armada de talents et de slogans".


Encore bravo aux militaires talentueux mobilisés sur cette campagne pour leurs slogans épurés ici rassemblés : "tisser des liens", "ne rien lâcher", "grandir ensemble", "croire en soi", "progresser ensemble", "tenir son rôle", "gagner en confiance", "repousser ses limites", "trouver sa force", "prendre ses marques", "être au rendez-vous", "donner le meilleur…


Une question demeure, quelle place est accordée au féminin dans ce processus de recrutement ?


Une interrogation demeure tout de même dans ce processus de recrutement d’une armée qui est un mot féminin mais qui mettait souvent le masculin en avant. Quelle place est accordée au féminin dans cette sélection ?

Je me demande par exemple si l’on posera, aux milliers de candidats masculins, la question qui permet à Robin Sappe, Chief People Officer d’Etam (2) dans un entretien d’embauche de vraiment savoir qui est en face de lui. Cette question est "Aimeriez-vous être une femme ?" dit-il dans son interview rafraichissante "l’homme qui n’a pas peur d’être remplacé par l’IA" par Sylvia Di Pasquale du Figaro. Posera-t-on aussi la question réciproque aux candidates "Aimeriez-vous être un homme ?" Il faudra que je le demande au réseau "Avec les femmes de la Défense", ce réseau professionnel féminin du ministère des Armées aussi ouvert aux hommes et dont j’apprécie le nom et l’action.


Pas évident tout cela, mais en attendant …au suivant ! Sentimentalement vôtre et à bientôt



(1) Liste de toutes les entreprises à mission consultable sur le site du cabinet d’avocats LePlay. (2) Etam, dont les femmes sont la raison d’être et les sublimer sa mission !


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