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L'amour, toujours l'amour, mais pas chez Mc Do

Dernière mise à jour : 18 avr.



Le licenciement d’un CEO performant par son Board pour ne pas avoir respecté les valeurs du groupe pose une question : dans quelle mesure les croyances implicites des actionnaires ont-elles joué un rôle dans cette décision ?


Ce matin là, une news déchire le PAF au petit matin : Steve Easterbrook, le patron monde de McDonalds, est licencié pour avoir fait preuve de poor judgment (il a entretenu une liaison avec un.e salarié.e). Selon moi il a suivi son cœur plutôt que le règlement intérieur. Cette sanction est d’autant plus surprenante que ce CEO a pourtant, against all odds, doublé la valeur de l’entreprise en 5 ans dans un secteur oh combien mature. Moi, l’adepte de l’honnêteté émotionnelle, je me dis : « Ludo, tu vis en direct un tournant historique du monde économique… Des CEO totems vont tomber comme des dominos, mais le tabou de l’amour entre salarié(e)s de la même entreprise restera intact. C’est la primauté des valeurs puritaines sur les valeurs capitalistes qui se joue ici et maintenant ».


UN EFFET RITA MITSOUKO

Pris d’un vertige, je pense aux règlements intérieurs qui vont devenir le livre de chevet des lawyers, je pense à Moody’s qui va distribuer des AAA de moralité. Car ce marché va s’enflammer, Steve n’est ni le premier ni le dernier à prendre un coup de foudre en plein cœur : Intel a ouvert le bal, McDo enchaîne. Malheureusement, France Inter ne précise pas comment Steve a transgressé le règlement intérieur : l’amour platonique est-il autorisé ? L’amour épistolaire toléré ? Devant la glace, mes yeux plantés dans les miens, je soupçonne l’amour de Steve d’avoir été consommé, car chez McDo on est explicitement incité à la consommation. Je suis d’ailleurs préoccupé pour la nouvelle moitié de Steve qui partageait avec lui le même logo en haut de la fiche de paye, mais pas le même total en bas.

Tout de même, l’homo œconomicus qui sommeille en moi au petit matin doute de cette explication exclusivement rattachée aux valeurs du Groupe, alors je creuse cet apparent hiatus entre puritanisme et capitalisme. Je surfe sur le site de la BBC en me disant que ce média va défendre Steve, son enfant du pays, ce British brillant et divorcé qui est parti chez l’oncle Sam et qui se retrouve au chômedu ! Et là, au détour de l’article, je découvre que ce n’est peut-être pas le respect du règlement intérieur qui a dicté la décision des actionnaires, mais une croyance pessimiste.  Comme les Rita Mitsouko, les actionnaires sont convaincus que les histoires d’amour finissent mal…en général !

En effet, une spécialiste explique que les actionnaires peuvent être inquiets de la volatilité des relations amoureuses. Alors pour préserver la stabilité des revenus futurs, le Board a peut-être préféré se séparer de Steve dès maintenant. Il ne le voit pas comme un CEO augmenté, inspirant car inspiré, mais comme un CEO imprévisible qui pourrait ne pas raison garder.


Les croyances plutôt que la rationnalité.


Morale de l’histoire : à l’origine de tout choix stratégique d’un Board, COMEX, CODIR, il y a toujours des croyances. Elles sont ces certitudes et ces prismes de lecture non questionnés et pourtant tellement utilisés pour décider. Alors pour décider plus librement, en presque toute indépendance, il est nécessaire de faire émerger les croyances enfouies dans ces lieux de décision : c’est la condition sine qua non du libre arbitre, de la décision éclairée. A défaut, nous ne ferons que reproduire les schémas décisionnels du passé, et ça c’est inquiétant dans notre monde VUCA.

En attendant, Steve, n’ait pas trop de regrets : avec ton histoire d’amour tu as certes perdu plus de millions de dollars que je ne pourrais jamais en gagner, mais tu n’avais peut-être pas les mêmes croyances que tes actionnaires en matière d’amour.



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